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19 septembre 2024Pousser les entreprises européenne vers la voie de la durabilité écologique et sociale, telle est l’ambition des deux nouvelles directives qui viennent révolutionner les obligations des entreprises : le devoir de vigilance ainsi que le rapport de durabilité. On fait le point sur la portée de ces deux nouveaux outils bientôt en application.
Régulièrement, la cellule environnement de la CSC vous informe de l’évolution de l’actualité concernant ces directives. Pour cause, elles révolutionnent la manière de « penser l’entreprise ». Jusqu’à présent, les entreprises étaient exclusivement évaluées sur leurs performances économiques et financières. Dorénavant, ce champ d’évaluation sera beaucoup plus large. A partir de l’an prochain, les grands entreprises devront maintenant faire rapport sur leur durabilité, incluant un volet environnemental, social et de gouvernance. C’est ce qu’on appelle la directive « CSRD ».
A partir de 2027, elles devront également accomplir un « devoir de vigilance » qui assure le respect de l’environnement et des droits humain dans toute la chaine d’activité. C’est ce qu’on appelle la directive « CS3D ». Concrètement, les entreprises vont devoir identifier ces risques et montrer qu’elles mettent en place des actions pour les prévenir, les atténuer ou les réparer.
Ces nouveaux outils d’évaluation et de contrôle sont perçus très positivement par les organisations syndicales.
Le rapport de durabilité concernera directement les travailleurs de l’entreprise au vu des thématiques abordées (axe social, de gouvernance et environnemental). Ces éléments seront discutés dans les conseils d’entreprise, au moment de l’information annuelle.
Le devoir de vigilance augmentera la responsabilité des entreprises sur l’environnement et la justice sociale. La directive concernera davantage les travailleurs à l’extérieur de l’entreprise, faisant alors appel à la solidarité syndicale à travers le monde.
Mais comment va se traduire leur mise en application ?
Les entreprises ciblées
Initialement, le champ d’application des deux directives devait être le même. Malheureusement, le lobbying patronal a diminué le nombre d’entreprises visées par le devoir de vigilance. Alors que la directive CSRD concerne 55.000 grandes entreprises européennes, le « devoir de vigilance » ne concernera qu’environ 8.000 entreprises en Europe. A l’échelle de la Belgique, on estime que 2.280 sociétés seront tenues de faire un reporting “durable”, alors qu’elles ne seront que quelques dizaines à devoir appliquer la CS3D sous nos latitudes.
Cette différence de champ d’application complexifie donc la mise en œuvre des directives sur le terrain, celles-ci ayant été imaginées dans leur complémentarité.
De plus, la non concordance des directives entraine une insécurité juridique dans leur application. Par exemple, Gauthier Van Thuyne et Axel de Backer, tous deux avocats interrogés par le journal l’Echo du 23 juillet expliquent que « la directive de reporting (CSRD) parle de la notion de « chaine de valeur » alors que la deuxième directive « CS3D » parle de « chaine d’activité », notion beaucoup plus large.
Effet domino
La bonne nouvelle, d’un point de vue syndical, c’est que même si peu d’entreprises sont concernées par un « devoir de vigilance », toute entreprise qui sera impliquée dans la chaine d’activité d’une grande entreprise concernée sera impactée et devoir suivre un code de conduite. L’impact dépassera donc largement les entreprises concernées par la directive.
Quid des entreprises non européennes présentes en Europe ?
Actuellement, la directive n’est pas claire à ce sujet. Or, pour les entreprise européennes, il y aura des coûts de « conformité » afin de répondre aux nouvelles exigences. Cet élément devra donc être considéré pour ne pas sanctionner les entreprises les plus vertueuses.
Quid des entreprises dont l’activité a un impact très négatif, voir irréparable sur l’environnement et les droits humains ?
L’état d’esprit de la directive n’est pas de pousser les entreprises à arrêter leurs activités mais bien d’améliorer leur conduite. Cela dit, il est possible que cette situation arrive. Les représentants syndicaux doivent donc être attentifs à pousser les entreprises à l’exemplarité sociale et environnementale. Et pour les travailleurs employés dans des activités dont l’impact est irréparable, il faut impérativement anticiper et actionner des leviers de formation et d’accompagnement afin de rendre le personnel plus résilient dans sa transition vers un autre emploi.
Quid du devoir de vigilance dans le secteur bancaire ?
Pour le secteur bancaire, la chaine d’activité est très large et la directive très impactante. Le législateur fera une attention particulière à la mise en application dans le secteur. Imaginons qu’une banque souhaite octroyer un prêt à une entreprise responsable de déforestation ou de perte de biodiversité, elle devrait alors entamer des discussions avec son client pour prévenir de ces risques.
A noter enfin que la Belgique a jusque juillet 2026 pour transposer la directive dans le droit national.