Les prix explosent… la précarité aussi!
22 mars 2022Dans la m…, on te croit! Politique? On te voit!
11 avril 2022Contrairement à une vieille idée reçue, malheureusement bien coriace, la préoccupation environnementale n’est ni un frein ni un handicap au développement économique, pas plus qu’à celui de l’emploi. L’environnement est devenu une branche d’activité importante. Les enjeux climatiques font partie des priorités syndicales depuis de nombreuses années.
Ainsi, l’emploi dans le secteur des biens et services environnementaux représentait en 2018 dans l’Union européenne, selon une estimation d’Eurostat 4.894.000 emplois ETP, dont 40.744 pour la Belgique, 626.624 pour l’Allemagne, 562.769 pour la France, 17.079 pour le Luxembourg et 144.629 pour les Pays-Bas.
Le 14 juillet 2021, la Commission européenne a publié son paquet Fit for 55 (Ajustement à l’objectif 55), qui se compose de 13 propositions législatives visant à aligner les politiques de l’UE en matière de climat et d’énergie sur les nouveaux objectifs climatiques fixés par la loi sur le climat récemment adoptée, à savoir une réduction des émissions de GES d’au moins 55% par rapport aux niveaux de 1990 d’ici 2030 et la neutralité climatique d’ici 2050.
Il va sans dire que l’orientation de l’économie vers une plus grande durabilité influence le marché du travail d’au moins quatre manières différentes :
– la création de nouveaux emplois dans le secteur des biens et des services environnementaux (par ex. dans la fabrication des dispositifs de contrôle de la pollution) ;
– Le remplacement de certains emplois par d’autres (par ex. lors de la transition des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables) ;
– La disparition de certains emplois sans remplacement (par ex. dans la fabrication des matériaux d’emballage, si les emballages ne sont plus utilisés). Toutefois avec l’application de l’économie circulaire, les matières et matériaux seront davantage réutilisés ou recyclés dans le process ;
– La transformation de certains emplois existants redéfinis selon des compétences, méthodes de travail et profils des employé.e.s «verdis» («écologisés») (par ex. dans le cas des plombiers, électriciens, des travailleurs dans la métallurgie ou dans la construction).
Cependant, les syndicats européens représentés par la CES (Confédération des Syndicats européens) ont fait savoir auprès de la Commission que le paquet législatif est beaucoup trop faible en ce qui concerne la dimension sociale.
Le Pacte vert de la Commission, pas assez social
Pour être socialement acceptable, l’ambition climatique proposée dans le paquet devrait s’accompagner d’une ambition sociale équivalente, selon la CES.
« Le programme du pacte vert pour l’Europe devrait en effet être utilisé comme une occasion de maintenir et de créer des emplois de qualité, de promouvoir le travail décent dans tous les secteurs, d’élever les normes du travail, de lutter contre les discriminations au travail, de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes et la démocratie sur le lieu de travail ».
« La création récente d’un mécanisme pour une transition juste et d’un fonds pour une transition juste – dédiés à soutenir les régions fortement dépendantes des industries à forte intensité de carbone – est une première étape positive qui a été saluée par les syndicats à l’époque. Cependant, la taille du fonds reste beaucoup trop limitée pour relever les défis en jeu. Le champ d’application du Mécanisme, qui est limité aux régions fortement dépendantes des industries du charbon, du lignite, de la tourbe, du schiste bitumineux et du carbone, est trop étroit. Il ne prévoit pas non plus de soutien pour d’autres secteurs qui seront touchés par les changements, tels que les transports, la construction, l’agriculture, le tourisme et d’autres industries ».
« Tout cadre de transition juste doit s’attaquer à tous les secteurs économiques confrontés à la transition et doit inclure les chaines d’approvisionnement. Il faudrait également faire davantage pour associer correctement les syndicats à la conception des plans de transition territoriale juste. Une enquête récente menée par la CES auprès de ses afilié.e.s montre en effet qu’il y a encore des problèmes à cet égard dans un certain nombre de pays».
« Parallèlement à ces considérations, la Commission devrait également garantir la création d’emplois de qualité dans l’UE grâce à la mise en œuvre du paquet “ Fit for 55 ” et de l’UE de la prochaine génération. Cela devrait faire l’objet d’un suivi et d’une évaluation réguliers. Cet accent mis sur des emplois de qualité sera crucial pour garantir des conditions de travail décentes tout en exploitant le potentiel de création d’emplois des secteurs qui seront nécessaires pour réaliser la transition verte – tels que la rénovation des bâtiments, les transports publics, les énergies renouvelables, l’hydrogène vert, les batteries, les véhicules électriques, l’économie circulaire, l’efficacité énergétique, etc. »
Enfin, pour que l’environnement devienne réellement un facteur de création d’emplois, les politiques publiques ont un rôle essentiel à jouer. Elles peuvent convaincre que l’environnement est un bien public à long terme et pas seulement un nouveau marché à court terme.
L’environnement, la mobilité, la transition: des terrains d’action syndicale
Début des années 1990, la question environnementale se structure au sein des deux grands syndicats en Wallonie. En 1990, les congrès de la FGTB et de la CSC abordent tous deux le thème de l’environnement. Ainsi, l’une des lignes de force de la CSC est de réclamer un élargissement des droits syndicaux à la protection de l’environnement. La FGTB explore également la thématique en questionnant le modèle de consommation et en évoquant la notion de « croissance qualitative ».
En 1996, deux évènements contribuent à l’essor d’une concertation sociale sur la thématique environnementale. Tout d’abord, en octobre 1996, la Région wallonne octroie une subvention à la CSC et à la FGTB afin de développer des actions environnementales via le projet RISE (Réseau intersyndical de sensibilisation à l’environnement), qui sera suivi en 2003 d’une subvention accordée à la CGSLB pour le projet Prepart.
Ensuite, la loi du 4 aout 1996 sur le bien-être des travailleurs et l’arrêté royal du 3 mai 1999 élargissent les droits syndicaux en termes d’environnement. Il s’agit de sensibiliser à l’environnement les travailleur.se.s et leurs représentant.e.s pour renforcer leur capacité d’intervention sur cette question dans les organes de concertation et de négociation des entreprises que sont le Comité pour la Prévention et la Protection au Travail (CPPT), le Conseil d’entreprise (CE) et la Délégation Syndicale (DS). Cela permet de stimuler dans les entreprises la concertation sociale en environnement.
RISE existe donc depuis 26 ans et a la particularité de travailler au niveau intersyndical en matière de sensibilisation et d’accompagnement des délégué.e.s d’entreprise sur les matières environnementales et tout cela par le biais d’une convention cadre avec la Région wallonne. C’est l’unique initiative existante au niveau des organisations syndicales européennes. Les collaborateurs de RISE sont d’ailleurs régulièrement invités à témoigner de notre travail lors de séminaires européens.
Chaque organisation syndicale organise des sessions de formation, conseille et collabore à des programmes de formation avec des centrales syndicales, des groupes spécifiques, des associations externes au syndicat également. De nombreux outils sont préparés et rédigés en front commun et déposés sur le site internet.
Enfin, nous accompagnons des équipes syndicales pour des expériences pilotes en matière d’environnement et de développement durable. La cellule Rise de la CSC (FEC) a réalisé dernièrement une série de vidéos reprenant des témoignages de délégué.e.s syndicaux sur différentes expériences en matière d’environnement et de développement durable en entreprise.
Dans les premières phases de RISE, tout a été centré sur le monde de l’entreprise mais par la suite, une réflexion a été menée sur le système de production et de consommation, afin de toucher le public de l’entreprise et les délégué.e.s, avec des thématiques tendant vers le post-matérialisme : alimentation durable, ondes électromagnétiques, éco-consommation en entreprise, biodiversité, écologie industrielle, circuits courts. Des ponts sont jetés vers les autres mouvements sociaux et des partenariats sont créés avec des associations de consommateurs ou avec des mouvements écologistes. Fin des années 1990, des expériences telles que la grande distribution ou l’incinération dans la zone Ipalle (Wallonie picarde) sont novatrices.
Enfin, le travail d’influence des équipes RISE se situe dans plusieurs sphères : la formation, l’entreprise et la structure syndicale elle-même. En plus de vingt ans, la réflexion et les actions ont évolué dans les trois sphères mais il y a encore beaucoup de travail, la structure syndicale étant sans doute la plus difficile à sensibiliser …